jeudi 23 septembre 2010

Appel pour la libération immédiate du Général à la retraite Fayez Karam, détenu arbitrairement dans une « prison spéciale »

Les violations multiples des droits du détenu, tels que garantis par la loi libanaise et les engagements internationaux du Liban, sont d’une gravité telle que sa détention est arbitraire. La procédure engagée contre l’officier doit donc être immédiatement annulée et ce dernier libéré.

Des représentants du CLDH (Centre Libanais des Droits Humains) ont essayé cette semaine de rendre visite au Général Fayez Karam à la prison de Roumieh (bâtiment dit « Maalumet », relevant des services de renseignements des Forces de Sécurité Intérieure) mais n’ont pu accéder au lieu de détention que ses gardes qualifient eux-mêmes de « prison spéciale», à laquelle les ONG ne peuvent accéder contrairement aux autres secteurs de la prison centrale.

Cette tentative de visite était motivée par les inquiétudes concernant la situation physique, psychologique et légale du détenu.

En effet, depuis son arrestation le 3 août 2010, le Général Karam est sous la garde des mêmes forces de sécurité ayant procédé à son arrestation, et à son interrogatoire, ce qui altère son droit à se défendre et le place au risque d’être soumis à des pressions sur sa personne, voire à la torture.

Par ailleurs, selon les informations disponibles, le Général Karam n’a à ce jour toujours pas eu le droit de s’entretenir en tête a tête avec ses avocats, ceci en contradiction notamment avec l’article 14 alinéa 3 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques ratifié par le Liban [9] et avec le règlement intérieur des prisons libanaises qui stipule que les visites des avocats peuvent se dérouler « sans la présence d’un gardien si le prévenu ou l’avocat en formulent la demande ».

En outre, suite à son arrestation, le Général Karam aurait été détenu au secret et interrogé sans l’assistance de son avocat durant 8 jours, avant d’être présenté à un juge d’instruction, en présence de son avocat mais sans avoir pu s’entretenir préalablement avec ce dernier, en contradiction avec l’article 47 du Code de Procédure Pénale[10] et l’article 14 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques[11].

Outre ces violations dans la procédure, le Général Karam aurait été victime de diffamation de la part de certains médias peu scrupuleux, qui auraient prétendu rendre publics ses « aveux », avant même que la Justice n’ait été saisie du dossier. Ceci pourrait constituer une grave atteinte au secret de l’instruction et à la présomption d’innocence dont le détenu est supposé bénéficier, notamment en vertu de l’article 14 alinéa 2[12] du Pacte International relatif aux droits civils et politiques.

Le CLDH considère que dans ces conditions, le Général Karam est non seulement soumis à une détention arbitraire, mais également à des risques pour son intégrité physique et psychologique, d’autant que l’intéressé est âgé de 62 ans et présente de sérieux problèmes de santé.

Le Centre Libanais des Droits Humains demande aux autorités judiciaires libanaises :

• D’ordonner une enquête immédiate pour déterminer les responsables des violations gravissimes des droits humains dont aurait été victime le Général Karam
• De libérer immédiatement le Général Karam en attendant les résultats de l’enquête sur les violations qu’il semble avoir subies
• D’annuler toute déposition que le prévenu aurait faite au cours de sa détention arbitraire
Le CLDH demande au Ministère de l’Intérieur de prendre les mesures qui s’imposent pour que le bâtiment dit « Maalumet » au sein de la prison de Roumieh soit placé sous la direction des prisons des Forces de Sécurité Intérieure et soumis à leur règlement.

Le CLDH demande aux Barreaux du Liban de prendre des mesures immédiates pour mettre un terme aux restrictions imposées de facto aux avocats dans leur exercice, et en particulier l’absence de confidentialité des entretiens.

Le CLDH demande aussi à l’ordre des journalistes de faire appliquer la loi libanaise et la déontologie journalistique auxquels sont soumis les journalistes pour que ces derniers cessent enfin de violer quasi systématiquement le secret des instructions et la présomption d’innocence des personnes arrêtées.

Le CLDH tient les autorités libanaises pour responsables de l’intégrité physique et psychologique du Général Karam et se réserve le droit de prendre toutes les mesures nécessaires au niveau international pour la préservation des droits du détenu.

Beyrouth, le 23 septembre 2010

Contact presse : Wadih Al-Asmar 70 950 780